On ne peut plus contester sérieusement que notre mode de vie détruit notre maison : le nombre d'espèces animales et végétales disparaissant chaque année est désarmant; et le taux de leur extinction est de cent à mille fois plus élevé qu'avant le capitalisme. Il semble que la triste parade des grenouilles, oiseaux et coraux de la case "vulnérable" à la case "en danger" s'impose comme un spectacle que nous ne cesserons de contempler que quand il s'agira d'y jouer le même numéro. Dans une telle situation, où les États capitalistes ne peuvent plus exactement se représenter aux sociétés civiles comme des gardiens de leur bien-être, on finit par s'agiter sous les costards. Des représentant·e·s se rassemblent ainsi du 7 au 19 décembre à Montréal dans le cadre de la 15e itération de la Conference of Parties (COP) sur la biodiversité, instance de l'ONU visant à limiter le saccage humain (capitaliste, impérialiste, mâle et colonial) de nos écosystèmes, tenue annuellement, question d'adopter des résolutions non-contraignantes pour les États participants - en autant que l'on puisse "participer" à une telle inaction. L'efficacité toute relative de tels rassemblements n'est pas tellement choquante en soi qu'en tant qu'elle trouve sa limite dans les causes mêmes des problèmes que ces conférences visent à résoudre. En effet, non-seulement les COP n'ont pas de pouvoir concret, mais elles seraient incapables de même gesticuler en direction de solutions efficaces et durables puisque leurs recommandations sont le résultat de conciliation entre les pouvoirs d'argent et d'État, où les scientifiques, ONG et autres communautés tiennent un rôle largement cosmétique, non décisionnel et n'agissent que comme une bien mince couche de peinture verte sur la machinerie capitaliste destructrice.
La Coalition anticapitaliste et écologiste contre la COP15 appelle conséquemment à participer à la manifestation du 10 décembre, appelée par le Collectif COP15 et d'y faire bloc pour qu'y soit entendu un discours écologiste sans compromis avec les impératifs bourgeois qui ont trop longtemps balisé l'action étatique de protection du vivant. La "Marche pour le vivant", qui doit partir du monument Georges-Étienne Cartier samedi à 13h, a pour but d'en appeler aux gouvernements à prendre des engagements tels que l'accession au statut de territoire protégé pour 30% du territoire terrestre, ou la responsabilisation légale des États quant à la préservation du vivant sur leur territoire. Or bien sûr, la manière par laquelle des États capitalistes, par exemple, préserveraient le territoire, c'est en en chassant les populations, puisqu'il est impensable pour de tels pouvoirs que des modes de vie non-écocidaires (c'est-à-dire motivés par autre chose que la croissance économique dérégulée qu'exige le capitalisme pour survivre) y prolifèrent. Comme si les peuples autochtones, sur les terres desquels est préservée une large partie de la biodiversité terrestre à protéger ainsi, n'avaient pas vécu dans des rapports responsables à leur environnement pendant des millénaires! Comme s'il était impossible de transformer notre rapport à l'activité humaine pour qu'elle nous serve sans nous nuire!
Nous participerons donc, et vous invitons à vous joindre en masse, à la marche du 10 pour exprimer notre support critique à son message et ses objectifs. Nous croyons que d'autres mondes sont possibles, qu'ils sont même souhaitables; nous croyons aussi que les États capitalistes ne nous assisteront pas dans leur invention, qu'ils feront toujours tout en leur pouvoir pour empêcher qu'on les fasse naître, parce que leur émergence n'est pas compatible avec les plans chiffrés des banquiers et des industriels qu'ils servent, plans qui impliquent la saisie de nos corps exploités, des ressources des sous-sols, plans inhumains qui sont hégémoniques à cette époque qu'on appelle ironiquement "anthropocène".
Osons lutter, osons vaincre.
Rendez-vous le 10 décembre à 13h, sous le grand drapeau noir, en face du parc Jeanne-Mance (sur la rue Parc)